Shadow theater / Tigran Hamasyan
On accède à ce théâtre d'ombres par
une mélodie douce-amère jouée sur un piano désaccordé façon
Ennio Morricone, clin d’œil aux sonorités du Santour, instrument à
cordes frappées très utilisé en Arménie, pays d'origine de ce
jeune pianiste de jazz prodige, 26 ans seulement.
Le décor planté, on est vite happé
par une musique inclassable et décloisonnée à l'extrême.
Entouré
d'un quintet en osmose avec ses élans de créativité, Tigran
s'affirme désormais au chant et montre des talents de songwriting.
Ancrées dans le folklore arménien, se nourrissant de musique
médiévale, classique ou contemporaine, du lyrisme mélodique de
Radiohead au jazz-rock de Return to Forever voire Magma, ces "pop
songs"du futur brisent les côtes codes de la
musique convenue et routinière.
Ainsi se succèdent moments oniriques
et assauts sonores d'une brutalité héritée du hard rock, maillage
électronique et fureur rythmique.
Deux ans seulement après le magistral "A
fable", Tigran Hamasyan continue de tracer sa voie singulière
et fait de plus en plus figure de chef de file d'une scène jazz en
plein renouvellement.
Parmi ses admirateurs, on compte désormais
d'illustres aînés comme Chick Corea et Herbie Hancock.
Richard, Médiathèque
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Postillons
et crachouillis, 2013
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Juste
une note / BATpointG
Chanteur
populaire!
Armé
de son instrument rétro (l'accordéon), BatPointG s'émancipe, dès
sa première chanson ("C.Q.F.D."), de toute image passéiste
en slamant les innombrables sigles qui rythment notre vie
quotidienne.
Le décor est planté. BatPointG est un musicien
d'aujourd'hui et qui a intégré, comme le groupe de "rap-musette"
Java, hip hop, musette, slam, rock et chanson.
Les arrangements de
l'album sont dépouillés et l'accordéon, débarrassé de ses
paillettes, percute énergiquement les textes habiles de BatpointG.
On redécouvre tout un univers poétique, celui du "Grand
Paris", de "l'Ile de France", des "salles
carrées, sols à carreaux avec une sale sono"... Au début du
XX° siècle, dans les guinguettes du bord de Marne ou les bals
surchauffés de la rue de Lappe, les auvergnats, italiens et
manouches, confrontaient leur musique et donnaient naissance au genre
musette.
Aujourd'hui, BatpointG invite, autour de la boîte à
frissons, d'autres rythmes et d'autres cultures. Comme les
accordéonistes d'alors, il imprègne, de poussière, de sueur et de
chaleur humaine ses chansons populaires !
Thierry, Médiathèque
http://www.batpointg.com/
http://fr.myspace.com/batpointgmusic
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Jagjaguwar, 2013
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II
/ Unknown Mortal Orchestra
Nostalgiques des années 1960-70, ce jeune trio américain aux origines
néo-zélandaises emprunte sans complexe aux savoir-faire d'antan :
une guitare acoustique enregistrée comme si on était dans la même
pièce avec le crissement des doigts glissant sur les cordes, un
effet wah-wah à la Jimi Hendrix sur les guitares électriques, une
batterie sauvage et versatile, une basse souple et vrombissante, des
cuivres rutilants, des synthétiseurs aux sons cosmiques, un chant
filtré, aérien et nonchalant, illustrant à merveille l'insouciance
de ces années..
Bref, une nostalgie assumée pour une
époque où soufflait un grand vent de liberté !
Au final, imaginez la rencontre entre
les mélodies des Beatles ou de Love, le funk de Sly & The Family
Stone, le heavy blues-rock de Led Zeppelin, Cream ou Black Sabbath,
le tout passé à la sauce psychédélique façon Pink Floyd et vous
aurez une idée de la musique des Unknown Mortal Orchestra!
Richard, Médiathèque
Site du groupe : http://unknownmortalorchestra.com/
Asfar / Trio Joubran
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Randana, 2011 |
Cette formation inédite, 3 musiciens
jouant du même instrument traditionnel, nous embarque dans un voyage poétique, sensoriel et vibrant qui va bien au-delà de
la musique traditionnelle(asfar signifiant "voyage" en arabe et "aussi loin"
en anglais).
Connus dans toute l'Europe, ils se
produisent régulièrement en France
Ils sont aussi les compositeurs de la
musique du film "Adieu Gary" dans lequel ils apparaissent.
Framboise, Médiathèque
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Le Cirque Absent, 2012 |
Digère et recrache
/ Cabadzi
"Soyons fous, fuyons"
Sur un mélange de rap, de slam et
d'électro et accompagné d'instruments classiques, le premier album
de ces nantais (3 garçons, 1 fille) est un cri d'alarme sur la
réalité, le quotidien, sur ce qui déprime, ce qui révolte. C'est
aussi une critique acerbe de la société de consommation, des
grandes marques, des politiques, de la finance, du foot "la
pensée se limite au ballon rond", de la vie de famille "j'aime
pas Noël"...
Les textes de ce groupe engagé,
sincère déclenchent des émotions. Et nous secouent nous les
"uniformisés, robotisés, manipulés" dont les pensées et
les actes sont dociles et conformes.
Et ils nous posent une question
essentielle "saurons-nous encore aimer ?"
Framboise, Médiathèque
Old and new dreams / Don Cherry
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ECM, 1979 |
Dans la collection "Disques qui se méritent!"
Old and new dreams ou l'invitation au voyage spirituel à travers un jazz aux allures de rituels ancestraux et inspiré des cultures africaines et orientales. Thèmes mélodiques vibrants, créations en état d'urgence, funambulisme des improvisations et vivacité des esprits de tous les instants...
Old and new dreams et ses idiomes : revenir à la dimension primaire de la musique, redonner la priorité à l'émotion, à l'authenticité, à l'instant et l'immédiateté.
Old and new dreams comme une convocation universelle, une ode à la vie, à la différence, à la liberté et à l'ivresse qu'elle procure.
Old and new dreams par la réunion des quatre musiciens historiques du quintet d'Ornette Coleman, père fondateur du Free Jazz, se retrouvant des années plus tard pour célébrer cet héritage.
Old and new dreams enfin, comme un manifeste, une confirmation de leur engagement militant.
Richard, Médiathèque
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Rue Stendhal Diffusion, 2010 |
La belle époque / Francis Bebey
La "boîte magique"
C'est un coffret de 4
CD, très sobre, illustré par la photographie en noir et blanc d'un
chanteur africain. Il s'intitule "Francis Bebey, la belle
époque".
Un livret fort bienvenu
nous présente le parcours de Francis Bebey, né en 1929 dans un
quartier populaire de Douala au Cameroun, et devenu tour à tour
journaliste, écrivain, haut-fonctionnaire à l'UNESCO avant de se
consacrer entièrement à la musique. On apprend que cet humaniste
que l'on surnommait le "Brassens africain" a abordé, avec
talent et humour, les évolutions sociales et politiques du
continent africain. Il a également expérimenté toutes sortes
d'instruments (guitare, sanza, flûte pygmée, synthétiseur, voix
humaine, ...) et peut être considéré comme un des précurseurs de
ce qu'on appelle aujourd'hui la "world music".
A l'intérieur du coffret,
on découvre une cinquantaine de titres qui s'enchaînent de façon
toujours inattendue, alternant avec bonheur musicalité, humour et
humanisme.
Dans le quartier de son
enfance, le gramophone sur lequel il écoutait les disques était
surnommé la boîte magique. Dans un dernier clin d'oeil, 80 ans plus
tard et 10 après sa mort, le fantasque Francis Bebey invite à son
tour, dans nos platines CD d'aujourd'hui, toute la magie des
musiques africaines.
Thierry, Médiathèque
Au
service de l'émotion !
Sort
of revolution place
d'emblée son auditeur dans la position du confident. La proximité
de la voix et la chaleur des prises de son créent les conditions
idéales à la narration. Fink écrit des chansons sensibles qui
parlent de la vie de tous les jours. Tel un peintre impressionniste,
il suggère plus qu'il ne décrit. Chanteur habité, guitariste au
style très rythmique, il est accompagné sur la plupart des titres
par la basse de Guy Whittaker et de la batterie de Tom Thronton, un
duo rythmique subtil dont le groove minimal et tout en retenue sert
idéalement la rage latente des compositions. Celles-ci mélangent
folk, blues et soul aux racines électroniques et dub du songwriter
de Brighton, ancien Dj/ producteur.
Epurés, aériens, introspectifs et souvent mélancoliques, les dix
morceaux de l'album ont la force de l'évidence et l'élegance de la
sobriété. En artisan humble et méticuleux, Fink en a soigné
chaque détail pour ne retenir que l'essentiel. Un must !
Pour écouter l'album en streaming, c'est ici :
Voir un extrait vidéo :
Richard, Médiathèque
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Grand Royal, 2000 |
La meilleure raison d'écouter du punk rock depuis Nirvana!
Ce qui frappe d'emblée à l'écoute de
ce 4 ème opus du quintet d'El Paso, c'est l'énergie, l'urgence, la
fougue et la passion contenues dans cette musique... Jouer comme
si c'était le dernier jour de sa vie, tout donner...Ou comment
résumer en une phrase l'état d'esprit dans lequel se trouvent les 5
texans d'At the drive in au moment d'enregistrer... L'album de la
dernière chance !
Signé
chez Grand Royal, label des Beastie Boys et produit par la 'dream
team' Ross Robinson/Andy Wallace, Relationship
of command procure une
décharge d'adrénaline dont on ressort lessivé mais heureux, 12
chansons à la fois lyriques et survoltées ! Un sens mélodique inné
et des textes souvent engagés pour une convocation simultanée des
fantômes de Fugazi, des Pixies, du MC5 et des Stooges !. En sus, un
parrainage hautement symbolique, la présence sur un titre de
l'iguane en personne, Sa Majesté Iggy Pop ! Bref, toute l'urgence de
la fin du dernier millénaire résumée en 45 minutes d'un punk-rock
qui ne triche pas...
12 ans après sa sortie, Relationship
of command conserve sa
magie intacte au moment ou le groupe, reformé momentanément,
entreprend d'arpenter les scènes du monde entier dont celle du
festival Rock en Seine cet été.
Petit aperçu en
vidéo : At the drive in
Richard, Médiathèque
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Universal Music France, 2011 |
A
24 ans, Cyril Mokaiesh, chanteur engagé, "communiste
à c'qu'il paraît",
laisse tomber les guitares électriques de son précédent groupe de
rock. Comme Brel et Ferré en leur temps, il choisit d'habiller son
chant passionné d'arrangements subtils dans la grande tradition de
la chanson française. Forte tête aux textes forts, Mokaiesh chante
l'injustice ("Mon
époque", "communiste"),
le mal de vivre ("des
mots") ou la
passion amoureuse ("Tes
airs de rien", "chère amie")
sans être écrasé par le poids de ses aînés. En-chanteur culotté,
il réinvente la variété française des années 2010.
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